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Un journaliste est condamné à payer 7 000 $ à une femme et son conjoint pour avoir publié la photo de celle-ci vêtue du niqab

Résumé de décision : Hammedi c. Cristea, EYB 2014-242572 (C.S., 23 septembre 2014)
Un journaliste est condamné à payer 7 000 $ à une femme et son conjoint pour avoir publié la photo de celle-ci vêtue du niqab

Le défendeur est journaliste, éditeur et rédacteur en chef du mensuel Les immigrants de la Capitale. Les demandeurs lui réclament des dommages-intérêts de 150 000 $, dont 55 000 $ à titre de dommages punitifs, pour avoir publié sans leur consentement une photo d'eux, sur laquelle la demanderesse porte un voile intégral (niqab), et pour avoir porté atteinte à la réputation de celle-ci en affirmant faussement dans l'article accompagnant la photo que la demanderesse avait les yeux maquillés sous son niqab.

Leur réussite professionnelle ne dépend pas de l'opinion publique, et les demandeurs ne jouent pas un rôle de premier plan dans une affaire relevant du domaine public. L'article aurait très bien pu être publié sans que la photo y soit jointe. En outre, force est de constater que le défendeur n'a pas tenté d'obtenir des demandeurs l'autorisation de publier la photo parce qu'il craignait d'essuyer un refus. Il ne pouvait donc inférer le consentement tacite des demandeurs à la publication de la photo de leur seule présence dans un endroit public. Le défendeur n'a pas prouvé que la publication de la photographie était justifiée par l'exception fondée sur l'information légitime du public.

Les demandeurs ont établi avoir ressenti un énorme déplaisir en voyant leur photo publiée sans leur consentement. Non seulement se sont-ils sentis humiliés et atteints dans leur honneur, mais ils ont limité leurs sorties, de peur d'être interpelés ou provoqués. La Cour suprême enseigne que l'atteinte à la vie privée peut simplement consister dans le déplaisir qu'éprouve la personne à devenir une «figure connue». Chacun des demandeurs est ainsi fondé à recevoir une indemnité de 3 500 $ à titre de dommages moraux.

Cependant, en écrivant que les yeux de la demanderesse étaient «étonnamment mis en évidence de façon très coquette par un contour de fard bleu ciel», le défendeur n'a pas porté atteinte à la réputation de celle-ci. Le fait que la religion de la demanderesse lui interdise d'être maquillée lorsqu'elle porte le niqab ou qu'elle ait été ou non maquillée importe peu. La preuve que ces propos sont diffamatoires, c'est-à-dire qu'ils sont de nature à lui faire perdre l'estime du citoyen ordinaire ou à susciter à son égard des sentiments défavorables, n'a pas été faite. La réclamation pour l'atteinte à la réputation est par conséquent rejetée. Enfin, s'il est possible de conclure au caractère intentionnel de la faute du défendeur, il n'est pas permis de croire que ce dernier voulait porter atteinte aux droits fondamentaux des demandeurs, le défendeur estimant être fondé à agir de la sorte en raison du principe de l'information légitime du public. Il n'y a donc pas lieu de faire droit à la demande de dommages punitifs.


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