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La Cour supérieure refuse d'accorder des relations personnelles à une grand-mère maternelle, en raison notamment de la haine vouée par celle-ci à ses filles

Résumé de décision : Droit de la famille – 171721, EYB 2017-282456 (C.S., 17 juillet 2017)
La Cour supérieure refuse d'accorder des relations personnelles à une grand-mère maternelle, en raison notamment de la haine vouée par celle-ci à ses filles

La demanderesse est la mère des trois défenderesses et la belle-mère des trois mis en cause. Elle recherche par ce recours des droits d'accès à ses quatre petits-enfants, une pension alimentaire de ses trois filles et, enfin, une provision pour frais correspondant aux honoraires et coûts d'un acte de procédure, visant un de ses petits-enfants, qu'elle a dû présenter de façon intérimaire. Il s'agit de l'un de ces rares cas où il existe des motifs graves au sens de l'article 611 C.c.Q pour refuser des relations personnelles entre des petits-enfants et leur grand-mère. Quant aux autres demandes, elles sont également rejetées.

Au-delà des témoignages, tous accablants pour la demanderesse, le tribunal retient que durant tout le procès, cette dernière n'a jamais posé de questions sur ses petits-enfants. Aussi, elle n'a pas nié l'événement survenu à l'extérieur de la salle d'audience alors qu'elle a dit à sa fille L. qu'elle allait la « massacrer » durant le contre-interrogatoire à venir. Elle est manifestement incapable de maîtriser ses pulsions, comme le démontrent les insultes qui ponctuent ses courriels, les commentaires déplacés prononcés viva voce lors de certains événements. Ce sont ses filles qui n'ont eu de cesse de vouloir reprendre contact avec leur mère et se réconcilier avec elle et c'est cette dernière, par ses actions, ses gestes et ses paroles, qui a bousillé ses relations avec sa progéniture. La demanderesse est aveuglée par ses sentiments ; elle ne voit pas correctement les rapports qu'elle a avec ses filles. L'attitude générale de la demanderesse, son manque de circonspection, d'humilité, de respect, d'affection et d'amour vis-à-vis ses filles, laisse présager le pire à l'égard de ses petits-enfants. Elle ne pourra jamais leur dire autre chose que du mal de leurs parents. De plus, il est à craindre qu'elle utilise un vocabulaire inacceptable, ou du moins inadéquat, en leur compagnie. Elle est capable d'être grossière et vulgaire et non pas seulement en privé, mais aussi en public. Elle présente les traits d'une personne manipulatrice. Elle n'hésite pas à falsifier des documents à son avantage. Elle menace même de se suicider pour créer chez ses filles un sentiment de culpabilité. Dans son témoignage à l'instruction, elle traite ses filles de filles soumises et ses gendres, de parasites. Elle ne nie pas les adjectifs, les uns plus vulgaires que les autres, qu'elle a utilisés à l'égard de ses propres filles auparavant. Elle a remis en question l'autorité parentale et les méthodes éducatives de L. Elle s'est aussi impliquée, soi-disant à la demande de son ex-gendre, dans le couple de L. La demanderesse, tout au long de ses contre-interrogatoires, a adopté une attitude de défi. Elle souriait et dévisageait les défenderesses en affichant un air de dédain. Elle ne semble pas se rendre compte du mal qu'elle a causé et qu'elle continue de causer à ses filles. La rancoeur de la demanderesse à l'égard de son ex-conjoint est dirigée maintenant contre ses enfants, qui n'offrent à ses yeux aucune qualité. Elle fait pleurer, par ses commentaires, ses filles au cours de l'instruction. Elle démontre à leur égard de façon éclatante son mépris, voire sa haine, qui représente pour elle l'échec de son mariage et ce qui s'en est suivi. Elle dit réclamer justice dans la mesure où elle considère que son ex-mari, au lieu de lui payer une pension alimentaire, verse de l'argent à ses filles. C'est ainsi qu'elle qualifie sa démarche de « payback », car elle veut récupérer l'argent qui, selon elle, lui appartient, d'où la poursuite vis-à-vis ses enfants. Il y a lieu de se poser la question sur la motivation réelle de la demanderesse, alors qu'en février 2016, tout juste avant d'introduire la présente procédure, elle écrivait à son ex-conjoint : « […] Tes filles otages et boucliers. À défaut de toi, elles vont finir par payer à ta place.» Le 4 août 2016, elle écrit à L. : « J'avais dit à ton père que le temps du Pay Back était arrive. Confirme-le lui. […] Il a commis l erreur de sa vie en interférant pour X ». Le tribunal a la conviction qu'il existe en l'espèce des motifs graves empêchant la demanderesse de reprendre ou d'entretenir des relations personnelles avec ses petits-enfants.

La demande de pension alimentaire doit être rejetée, car la demanderesse n'a pas établi avoir de besoins dépassant ses capacités de gains et ses revenus. À tout événement, ses filles n'ont pas les moyens de contribuer de quelque façon que ce soit à une pension alimentaire en sa faveur.

La demanderesse réclame une provision pour frais de l'ordre de 800 $ représentant les honoraires engagés en décembre 2016 pour présenter une demande intérimaire afin d'envoyer une carte de voeux et un cadeau de Noël à X. Elle est d'avis que le recours au tribunal a été causé par l'intransigeance de L. et que cette dernière doit assumer les coûts occasionnés par cette démarche. Cette demande est rejetée. La demanderesse fait défaut de démontrer qu'elle a besoin de la provision pour frais pour présenter cette demande intérimaire ; son bilan ne soutient pas sa prétention. La débitrice éventuelle, L., n'a pas les ressources pour l'assumer et, surtout, il n'y a ici aucune question de protection des droits alimentaires des enfants. Enfin, le comportement de la demanderesse, alors qu'elle n'a pas épuisé les communications ou les recours extrajudiciaires, fait qu'aucune provision pour frais ne doit être ordonnée.

Pendant le délibéré, la demanderesse a déposé au dossier une demande de conclusions additionnelles. La demanderesse ne réclame pas la réouverture de l'instruction, et au contraire, demande de se prononcer sur la base de la preuve déjà au dossier. Étant donné la décision à laquelle le tribunal arrive après analyse de cette procédure inusitée, il n'est opportun ni de rechercher l'avis des autres parties ni de convoquer une audience afin de trancher. En effet, les questions portant sur les droits d'accès, la pension alimentaire et les frais d'avocats sont déjà traitées ci-dessus et aucun argument additionnel n'est proposé par la demanderesse. Quant aux conclusions concernant le remboursement de certaines sommes ainsi que la condamnation à des dommages moraux et punitifs, la demanderesse échoue à établir par la preuve prépondérante alors que le fardeau repose sur ses épaules la justesse de ses prétentions tant concernant l'un que l'autre. Elle ne démontre pas que les défenderesses se sont approprié des sommes lui appartenant et n'allègue même pas l'existence d'une quelconque relation financière entre les parties, en vertu de laquelle elle pourrait prétendre à la qualité de créancier. Elle ne prouve pas, au-delà de soupçons et conjectures, que la pension alimentaire qui lui est due par son ex-conjoint a été détournée par ses filles. Aussi, rien dans le comportement ou les actions de ses filles ne justifie l'octroi d'un quelconque dommage moral ou punitif recherché. Les défenderesses ont tout simplement décidé de couper les liens avec la demanderesse et n'ont posé aucun geste pouvant être qualifié d'indigne ni même de fautif. La demanderesse ne présente enfin pas un iota de preuve au sujet d'une atteinte à la réputation dont elle aurait été victime. Ainsi, toutes les réclamations consignées dans cette procédure supplémentaire doivent échouer.


Ce résumé est également publié dans La référence, le service de recherche juridique en ligne des Éditions Yvon Blais. Si vous êtes abonné à La référence, ouvrez une session pour accéder à cette décision et sa valeur ajoutée, incluant notamment des liens vers les références citées et citant.

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