Skip to content

La prestation d’aide à domicile versée par la SAAQ constitue un acquêt

Résumé de décision : Québec (Curateur public) c. N. (M.), EYB 2015-248496 (C.S., 23 février 2015)
La prestation d’aide à domicile versée par la SAAQ constitue un acquêt

Il s'agit de déterminer si la prestation d'aide à domicile versée par la Société de l'assurance automobile du Québec (la SAAQ) doit être considérée comme un acquêt et, par conséquent, doit être partagée ou s'il s'agit d'un propre qui dans un tel cas doit être versé en totalité à la succession de madame et dont les défendeurs sont les liquidateurs. Les parties se sont entendues pour que la décision ne porte que sur la somme de 229 690 $ actuellement déposée à la caisse populaire.

Tout d'abord, la qualification de la prestation sur le plan fiscal selon laquelle les sommes reçues à titre d'aide personnelle par la personne qui rend les services constituent des revenus imposables sauf s'il s'agit d'une activité maternelle fait ressortir que ce type de prestation peut être assimilé à un revenu. D'ailleurs, la déclaration de madame dans un formulaire de la SAAQ selon laquelle elle recevra un certain montant « pour les services fournis » est une autre indication qu'elle ne reçoit aucune indemnisation et qu'elle reçoit des montants pour les services qu'elle fournit.

En fait, la prestation qu'a reçue madame constitue un acquêt, et ce, pour plusieurs raisons. D'une part, l'article 449 C.c.Q. est un article résiduaire énonçant que ce qui n'est pas clairement établi comme étant un propre constitue un acquêt. En vertu de l'article 79 de la Loi sur l'assurance-automobile (la LAA), c'est la victime, ici monsieur, qui a droit à un remboursement en raison de l'accident automobile qu'il a subi. Madame n'a jamais été victime d'un dommage. Ainsi, la lecture de l'article 4 LAA en conjonction avec l'article 79 du chapitre V qui porte sur le type de prestation en cause permet de conclure qu'il ne s'agit pas d'une « indemnité » pour madame. Ce que prévoit l'article 4 LAA, c'est que ces remboursements constituent une indemnité pour monsieur, la « victime ». Si cela ne constitue pas une indemnité découlant d'un régime d'indemnisation au sens de l'article 454 C.c.Q., une seule conclusion s'impose : ces prestations constituent un acquêt.

Examinons plus en détail les règles applicables. L'exercice de la qualification des biens devient pertinent au moment de la dissolution du régime. Le premier alinéa de l'article 465 C.c.Q. prévoit que le régime se dissout lors du décès de l'un des époux. L'affirmation du caractère résiduaire des acquêts selon 449 C.c.Q. confirme l'intention du législateur de faire de la société d'acquêts un « véritable régime de partage » pour paraphraser une auteure. Pour qu'un bien soit désigné « propre », il doit exister un texte de loi qui le qualifie ainsi. Il faut également considérer que celui qui invoque qu'un bien est propre a le fardeau de le prouver. C'est en considération de ces règles que nous considérons que les prestations de soins à domicile en cause sont des acquêts. Les défendeurs ne se sont pas acquittés du fardeau de démontrer que ces prestations étaient des propres. La liste des biens qualifiés de propres dans le Code est limitative. Le caractère résiduaire qui découle de 449 C.c.Q. confirme que la société d'acquêts est un régime de partage, sauf exception.

En début d'audition, l'avocat des défendeurs présente un amendement qui n'a pas fait l'objet d'opposition et selon lequel l'argent reçu par madame le fut à titre de donation ou de prestation compensatoire de son époux et ne faisait donc pas partie des acquêts partageables. D'une part, la tardiveté de cet amendement participe à faire la démonstration de son absence de fondement. Tout le procès, tout le contrat judiciaire a été fait en fonction de la question posée au tribunal. L'article 1813 C.c.Q. indique que, même lorsqu'il est représenté par son tuteur ou son curateur, le mineur ou le majeur protégé ne peut donner que des biens de peu de valeur et cadeaux d'usage, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. De toute manière, la donation n'a pas été publiée conformément à l'article 1824 C.c.Q. Madame était tutrice à la personne et non aux biens et le curateur public, qui exerce la tutelle aux biens, n'a jamais donné un tel consentement. De toute manière, madame n'aurait pu se favoriser de cette manière.

Quant à la prestation compensatoire, il s'agit d'une mesure de justice et d'équité reposant sur les principes de l'enrichissement injustifié et il n'y a ici aucune preuve d'un tel enrichissement.


Ce résumé est également publié dans La référence, le service de recherche juridique en ligne des Éditions Yvon Blais. Si vous êtes abonné à La référence, ouvrez une session pour accéder à cette décision et sa valeur ajoutée, incluant notamment des liens vers les références citées et citant.

Ouvrir une session | Demander un essai gratuit

You May Also Like
© Thomson Reuters Canada Limitée. Tous droits réservés. Mise en garde et avis d’exonération de responsabilité.