Skip to content

Décision Live! de la Cour fédérale: commerce électronique ou pas, l’usage d’une marque de commerce étrangère en association avec des services implique des avantages ou des services accessoires ici-même au Canada

Par Me Sébastien Lapointe, Holmested & Associés s.e.n.c.r.l./LLP
Décision Live! de la Cour fédérale: commerce électronique ou pas, l’usage d’une marque de commerce étrangère en association avec des services implique des avantages ou des services accessoires ici-mêm

La Cour fédérale rendait récemment une nouvelle décision d’intérêt en matière d’usage de marques de commerce, dans Live! Holdings, LLC. c. Oyen Wiggs Green & Mutala LLP and Pickering Developments (Bayly) Inc. (2019 FC 1042) et précisait dans quelle mesure une société étrangère peut prétendre continuer à bénéficier de droit, quant à une marque, relativement à des services rendus à distance à des Canadiens.

Ce qui s’avère particulièrement intéressant dans cette décision, c’est qu’elle semble contredire d’autres décisions récentes en la matière, en concluant cette fois qu’en l’absence d’une présence réelle au Canada, il ne s’avère pas suffisant de permettre à des Canadiens de réserver des billets ou des séjours d’hôtels à l’étranger. Selon la Cour fédérale, le droit des marques de commerce exige davantage pour conclure qu’une entreprise étrangère utilise réellement une incarnation canadienne de sa marque de commerce.

Comme on s’en souviendra, la Cour fédérale rendait une décision à l’effet contraire l’an dernier (Hilton Worldwide Holding LLP c. Miller Thomson, 2018 FC 895), conclus que la chaîne hôtelière HILTON pouvait être considérée comme utilisant sa marque même en l’absence d’hôtels au Canada, puisqu’elle acceptait des réservations de chambres aux États-Unis, par des internautes Canadiens. Le fait que des Canadiens bénéficiaient, ici-même au Canada, d’avantages accessoires à l’hospitalité d’Hilton à l’étranger, justifiait de lui permettre de soutenir utiliser sa marque au Canada, en association avec des services d’hôtellerie.

Cette fois, cependant, la Cour est d’avis qu’on ne peut pas nécessairement être considéré « utiliser » une marque au Canada si, par exemple, le titulaire n’offre pas de services accessoires au Canada. Contrairement à la décision Hilton, par exemple, le titulaire de la marque dans Live! n’offrait pas de rabais ni de programme de fidélité, par l’entremise de ses services de réservations à distance, et qui puisse éventuellement être utilisés au Canada. Pour la Cour fédérale, une telle trame de faits ne permet pas de conclure que des Canadiens recevaient des avantages suffisants pour prétendre qu’une part réelle de la prestation des services visés s’effectuait au Canada. Selon le tribunal, simplement savoir qu’un client Canadien  sera admis à tel événement ou qu’il bénéficiera d’une chambre d’hôtel aux États-Unis ne rencontre pas le seuil requis en matière d’usage de marque de commerce en sol canadien, puisque l’activité en question se produit au-delà de la frontière. On parle évidemment ici de services tels ceux de vente au détail ou d’hôtellerie, par opposition à des services de réservation de chambres d’hôtel, par exemple.

Bien qu’il s’avère indubitablement possible pour une entreprise étrangère d’utiliser sa marque de commerce au Canada, par un contact avec les clients par Internet, en l’absence d’une présence physique au pays on doit offrir davantage.  Dans ce genre de situation, le droit canadien requiert que des Canadiens bénéficient de réels et tangibles avantages, au Canada, qui devront généralement aller au-delà d’avoir simplement accès à un site Web, par exemple.

Si on veut pouvoir prétendre utiliser une marque ainsi, encore faut-il que des Canadiens en tirent des avantages alors qu’ils sont en sol canadien.

Ce genre de scénario peut s’appliquer, par exemple lorsqu’un détaillant ou un exploitant d’hôtel transige par Internet ou par téléphone avec des Canadiens. À défaut de fournir une partie de ce qui constitue les services visés alors que le client est en sol canadien, en droit, ce n’est tout simplement pas de l’usage de la marque de commerce. Aussi, bien que notre droit accepte la possibilité qu’une société étrangère puisse atteindre le seuil de ce qui constitue de l’usage d’une marque en faisant affaire par Internet, encore faut-il qu’en pratique des Canadiens reçoivent effectivement des avantages et/ou des services accessoires en sol canadien. À défaut, il pourra s’avérer difficile de prétendre que (juridiquement) l’entreprise utilise réellement sa marque au Canada.

Également d’intérêt
© Thomson Reuters Canada Limitée. Tous droits réservés. Mise en garde et avis d’exonération de responsabilité.