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Pour respecter son obligation de remettre une facture à l'acquéreur d'un repas taxable, un restaurateur se doit de poser un geste actif; il doit prendre la facture et la tendre au client

Résumé de décision : Québec (Agence du Revenu) c. Vriniotis, EYB 2015-253401 (C.Q., 9 juin 2015)
Pour respecter son obligation de remettre une facture à l'acquéreur d'un repas taxable, un restaurateur se doit de poser un geste actif

L'Agence du revenu du Québec (ARQ) reproche au défendeur, un restaurateur, de ne pas avoir respecté son obligation de remettre sans délai une facture à tout client lors de la fourniture d'un repas taxable. Lors de visites au restaurant, des inspecteurs de l'ARQ ont en effet constaté que les employés du défendeur ne remettaient pas les factures aux clients. Ces dernières sortent plutôt d'une imprimante reliée à la caisse enregistreuse et demeurent attachées les unes à la suite des autres, pour tomber ensuite dans une poubelle. Une affiche installée sur la caisse enregistreuse indique en outre : « PRENEZ VOTRE FACTURE S.V.P. ». S'appuyant sur le mot « provide » que l'on retrouve dans la version anglaise de l'article 350.51 de la Loi sur la taxe de vente du Québec (la Loi), le défendeur soutient qu'il n'a pas à remettre les factures en mains propres et qu'il lui suffit de les rendre disponibles pour les clients.

L'exploitation d'un restaurant est une activité hautement réglementée. En application de la théorie de l'acceptation des conditions, les restaurateurs se doivent de respecter les lois qui encadrent leur champ d'activité économique. L'une de ces obligations légales concerne la remise d'une facture à l'acquéreur d'un repas taxable. Cette obligation ne peut être déléguée aux consommateurs sous prétexte d'efficacité ou de rentabilité. De plus, le mot « remettre » est utilisé plusieurs fois dans la Loi. À chaque occasion, son sens est clair et signifie mettre quelque chose en la possession de quelqu'un. Accepter le sens que le défendeur veut lui attribuer entraîne des incongruités et prive en plus d'effet une disposition législative imposant une obligation aux restaurateurs. Qui plus est, le défendeur propose une définition réductrice du mot « provide » qui ne tient pas compte de l'esprit de la Loi et du sens commun qu'il doit avoir avec le mot « remettre ». Et, même en supposant que le mot « provide » ait un sens différent de celui du mot « remettre », en cas de divergence, le texte français se doit de prévaloir en vertu de la Charte de la langue française et de la Loi d'interprétation du Québec. Il est vrai que le défendeur n'est pas tenu de remettre les factures en mains propres, ni d'exiger des clients qu'ils prennent leur facture. Cependant, pour respecter son obligation, le défendeur se doit de poser un geste actif; il doit prendre les factures et les tendre aux clients. Or, les employés du défendeur ne posent aucun geste actif; ils se limitent à inviter les clients à prendre leur facture. Un système qui fait en sorte que les clients doivent exiger leur facture ou la prendre eux-mêmes ne respecte pas la Loi. Par ailleurs, la méthode mise en place par le défendeur oblige chaque client à faire un tri dans une guirlande de factures non réclamées avant de trouver la sienne. Or, les restaurateurs se doivent d'individualiser chaque facture. Le défendeur n'a pas agi avec diligence raisonnable. Le fait qu'il exploite un restaurant dans un espace restreint et qu'il y ait une forte affluence ne constitue pas un moyen de défense. Un restaurateur ne peut refuser d'obéir à la Loi pour des motifs économiques ou de commodité. S'il veut servir plus rapidement ses clients, il doit embaucher plus de personnel pour exploiter son commerce.

Pour ces motifs, le défendeur est déclaré coupable des infractions reprochées et condamné au paiement de l'amende minimale.


Ce résumé est également publié dans La référence, le service de recherche juridique en ligne des Éditions Yvon Blais. Si vous êtes abonné à La référence, ouvrez une session pour accéder à cette décision et sa valeur ajoutée, incluant notamment des liens vers les références citées et citant.

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