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Affaire Point du jour aviation : point de violation de droits d'auteur sans prouver l'identité du contrefacteur en ligne

Par Me Sébastien Lapointe, Techtonik Legal inc.
Blogue juridique

La Cour du Québec rendait récemment un très bref jugement en matière de contrefaçon de droits d'auteurs quant à une photographie republiée dans Internet. La demanderesse dans l'affaire Point du jour aviation ltée c. Simard (2014 QCCQ 13560) demandait des dommages pour violation de ses droits d'auteur quant à une photographie qu'elle alléguait avoir été modifiée, reproduite puis diffusée en ligne par le défendeur M. Simard.

Bien qu'on parle ici d'une affaire d'ampleur modeste, l’un des moyens de défense invoqués par le défendeur présente néanmoins un point d'intérêt, alors qu’on devra conclure, en dernière analyse, que la preuve n'a PAS été faite, que c'était bien M. Simard qui était à l'origine des gestes reprochés. Sur cette question clé, la juge Nathalie Chalifour conclut en effet que la demanderesse n'a présenté aucune preuve directe du fait que ce soit effectivement au défendeur que soit attribuable la contrefaçon reprochée. Des dires de la juge, le demandeur ne fait que supposer que le défendeur a altéré puis placé en ligne la photographie visée. Pire encore, le défendeur a témoigné ici à l'effet contraire, en affirmant que son seul lien avec la photographie en question était de l'avoir partagée sur sa page personnelle du réseau social Facebook, à partir d'une autre page Facebook, une utilisation sans rapport avec les faits reprochés en l'espèce.

Afin de trancher, le tribunal s'en remettra donc finalement à la règle selon laquelle le demandeur se doit d'apporter la preuve des éléments requis de façon prépondérante, afin de se décharger de son fardeau de preuve. En cas de contradiction dans la preuve, le recours doit échouer si il est impossible pour le juge de favoriser l'une ou l'autre des thèses contradictoires en présence. Or, dans le cas qui nous occupe ici, le demandeur n’est parvenu à présenter aucune preuve directe que M. Simard était le responsable de la diffusion de la photographie, en suggérant plutôt d’inférer du partage de la photographie sur Facebook (aspect non pertinent dans le cadre de ce recours) que l’individu visé devait aussi être responsable de l’autre publication reprochée. En telles circonstances, on comprendra qu'un juge serait fort mal venu de donner raison à un demandeur. Le tribunal est donc contraint de rejeter la demande.

Cette décision illustre bien qu'en matière de droits d'auteur, le demandeur ne peut pas se contenter de prouver qu'il possède des droits quant à une œuvre dont il y a eu reproduction sans permission. Encore faut-il qu'il fasse ses devoirs, notamment afin de prouver que c'est bien à CE défendeur précis que sont attribuables le ou les gestes reprochés. Quand la trame de faits implique une diffusion en ligne, le fait de démontrer de façon suffisamment convaincante que tel ou tel individu est en réalité derrière cette diffusion pourra s'avérer périlleux, à moins d'être en mesure d'apporter des preuves techniques de son implication, par exemple. À défaut, de simples preuves circonstancielles ou indirectes pourront bien s’avérer insuffisantes.

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About the Author

Maître Sébastien Lapointe œuvre depuis plus de vingt ans en pratique privée centrée sur le droit des affaires et, en particulier, l’interaction entre celui-ci et les questions de propriété intellectuelle, dont de droit des technologies. Sa pratique se centre particulièrement sur l’enregistrement de droits de propriété intellectuelle et les ententes de transfert de droits et de technologies, dont les licences, et ce, autant au Canada qu’à l’étranger.

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