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Un tribunal confirme que le lancement d'une cryptomonnaie peut avoir pour résultat une émission de valeurs mobilières

Par Me Sébastien Lapointe, Techtonik Legal inc.
Un tribunal confirme que le lancement d'une cryptomonnaie peut avoir pour résultat une émission de valeurs mobilières

Un tribunal québécois confirmait récemment, par le biais d'une décision du Tribunal administratif des marchés financiers (le « TAMF »), que l'émission d'une cryptomonnaie peut, dans les bonnes circonstances, déclencher l'application de la réglementation en matière de valeurs mobilières. Malheureusement pour le couple de promoteurs de la cryptomonnaie PlexCoin, leur opération avortée de 2017 a été mise en place d'une façon qui ne laissait aucun doute sur le fait que l'opération s'avérait, en réalité, ni plus ni moins qu'un appel public à l'épargne. Comme chacun le sait, la Loi sur les valeurs mobilières (la « LVM ») s’applique à toutes les formes d’investissement, y compris aux « contrats d’investissement », ce à quoi équivalait le fait d’offrir aux membres du public d’investir dans PlexCoin.

Compte tenu de la preuve volumineuse amassée par l'Autorité des marché financiers (l'« AMF »), on semble avoir eu peu de difficulté à convaincre le tribunal que les ordonnances rendues en 2017 contre les créateurs de PlexCoin (Dominic Lacroix, sa conjointe Sabrina Paradis-Royer et leurs entreprises LEXCORPS, PLEXCOIN, DL INNOV INC. et GESTIO INC.) étaient amplement justifiées par les violations apparentes à la LVM commises par les promoteurs du projet avorté.

On s'en souviendra, PlexCoin était brièvement apparue sur le marché des cryptomonnaies, à l'automne 2017, avant d'avorter, à l'initiative de l'AMF et de la SEC américaine. Pendant les quelques semaines qu'a duré l'épisode, le couple de promoteurs de Québec (et leurs entreprises) aurait engrangé rapidement une quinzaine de millions de dollars payés par des membres du public avides de se procurer des pièces d'une prétendue cryptomonnaie à des taux de rendement annoncés faramineux.

Récemment, face à la contestation des ordonnances de 2017 par le couple accusé, l'AMF a été contrainte de présenter sa preuve de novo au tribunal, nous permettant d'obtenir un portrait global des activités des promoteurs de PlexCoin Dominic Lacroix et sa conjointe, notamment grâce à des perquisitions menées l'an dernier, y compris à leur domicile de Québec. À la lecture de cette décision, il demeure peu de doute que les efforts du couple en question visaient notamment à générer le plus de profits possibles dont (tel qu’allégué par l'AMF devant les tribunaux), en évitant sciemment de respecter les règles en matière de valeurs mobilières et l'implication de l'AMF, entre autres en cachant le fait qu’il s’agissait d’un projet mené par des Québécois, à partir du Québec.

À tout événement, le jugement en question vient, pour l’instant à tout le moins, confirmer qu’en droit, dans les bonnes circonstances, le lancement d'une cryptomonnaie peut certainement avoir pour résultat une émission de valeurs mobilières. En l'occurrence, toute prétendue cryptomonnaie que les promoteurs configurent d'une façon aussi centralisée que l'était PlexCoin se révèle susceptible de mener à l'application des règles en la matière. Dans ce genre de cas, en effet, on traite alors, non avec une créature indépendante de la volonté des instigateurs, mais plutôt avec un projet équivalent à une « affaire » ou une « entreprise » aux chances de succès et aux profits incertains, qu’on tente de financer par l’argent de membres du public. Il n’existe aucune différence, juridiquement, entre le fait de ce faire et solliciter de purs étrangers afin de les convaincre d’investir dans la société d’un entrepreneur trop entreprenant, justement.

Cela étant, le TAMF n’a eu aucune difficulté à reconduire les ordonnances déjà rendues, notamment afin de protéger les membres du public pendant que les procédures judiciaires à l’endroit de Lacroix et Paradis-Royer se poursuivent, autant au Canada qu’aux États-Unis.

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About the Author

Maître Sébastien Lapointe œuvre depuis plus de vingt ans en pratique privée centrée sur le droit des affaires et, en particulier, l’interaction entre celui-ci et les questions de propriété intellectuelle, dont de droit des technologies. Sa pratique se centre particulièrement sur l’enregistrement de droits de propriété intellectuelle et les ententes de transfert de droits et de technologies, dont les licences, et ce, autant au Canada qu’à l’étranger.

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