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Art. 3088 du Code civil

Art. 3088 du Code civil

Ce texte est paru originalement le 6 octobre 2016 sur le site de la Chaire de rédaction juridique Louis-Philippe-Pigeon de l'Université Laval. Il est reproduit ici avec la permission des auteures.

Un retour au droit antérieur

En consultant la dernière édition du Code civil du Québec publiée par le Centre Paul-André Crépeau et les Éditions Yvon Blais, on peut constater que l’article 3088, alinéa 2 de ce code a fait l’objet d’une modification importante, et on peut se demander si le législateur en a bien anticipé tous les effets.

Cet article, qui figure au livre du droit international privé, a été modifié comme ceci :

3088. Le mariage est régi, quant à ses conditions de fond, par la loi applicable à l’état de chacun des futurs époux.

Il est régi, quant à ses conditions de forme, par la loi du lieu de sa célébration ou par la loi de l’État du domicile ou de la nationalité de l’un des époux. Toutefois, lorsque l’un des époux est domicilié au Québec et est mineur au moment de la célébration du mariage, cette dernière doit être autorisée par le tribunal.

La modification a été introduite par la Loi apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes (2016, c. 12, a. 38) (projet de loi 59). Elle est entrée en vigueur dès l’adoption de la loi, le 8 juin dernier. Au début du mois d’octobre, elle ne figurait pas encore dans le Code civil publié en ligne par l’éditeur officiel LégisQuébec, ni dans celui publié par Canlii : l’efficacité et la rapidité des éditeurs du « petit code rouge » méritent donc d’être soulignées.

Jusqu’à son intégration au Code civil, cette modification aura échappé à l’attention des spécialistes du droit international privé puisque que rien ne la laissait présager : ni les consultations entourant le projet de loi, ni son titre, ni sa note de présentation.

L’intention du législateur, d’après la note de présentation et les explications de la ministre de la Justice lors de l’étude détaillée du projet de loi, était surtout de confier au tribunal le pouvoir d’autoriser la célébration d’un mariage lorsque l’un des futurs époux est mineur. On a aussi voulu s’assurer que cette protection ne serait pas perdue dans l’hypothèse où le mariage était célébré à l’étranger. Si l’intention peut être louable – il sera nécessaire d’y réfléchir encore --, la modification dépasse de beaucoup, par sa portée, l’objectif poursuivi.

Lors de l’adoption du Code civil du Québec en 1991, le législateur a fait le choix de diversifier les lois pouvant valider la célébration d’un mariage. Auparavant, comme l’avait déterminé le Conseil privé en 1930 (Berthiaume v. Dastous, [1930] A.C. 79), les formalités ne pouvaient être régies que par la loi du lieu de la célébration du mariage. La décision d’ajouter à cette loi celle de « l’État du domicile ou de la nationalité de l’un des époux » tenait compte de réalités plus contemporaines et favorisait, sur le plan formel, la reconnaissance du mariage à caractère international par le rattachement possible à plusieurs lois présentant des liens avec lui.

La question est de savoir pourquoi, en adoptant de nouvelles dispositions pour protéger les mineurs, le législateur a choisi de biffer ces autres rattachements pour ne conserver que la loi du lieu de célébration du mariage. Il s’agit d’un retour au droit antérieur, non seulement pour l’époux mineur, mais pour tous les époux! Il n’était pas nécessaire d’en passer par là pour s’assurer de l’efficacité des nouvelles protections en faveur du mineur.

Sylvette Guillemard et Michelle Cumyn

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