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Les registres de la copropriété

Par Me Christine Gagnon, notaire, Gagnon Bujold notaires
Les registres de la copropriété

Registre de la copropriété. Le Code civil du Québec et la déclaration de copropriété imposent au syndicat le devoir de tenir des registres. Parmi tous les documents et registres que conserve le syndicat, il doit en tenir certains à la disposition des copropriétaires398. Ces registres et les documents qu’il conserve appartiennent au syndicat, et non aux copropriétaires eux-mêmes399.

Rien n’empêche le syndicat de facturer des frais raisonnables pour compenser le temps consacré à la consultation par un copropriétaire. Il est utile d’ajouter que la Cour du Québec a jugé abusive l’attitude d’un syndicat qui a facturé au copropriétaire les frais d’avocats du syndicat pour la supervision du copropriétaire pendant sa consultation400.

Règlements. Les modifications au règlement de l’immeuble ne sont pas notariées ni publiées au registre foncier depuis le 1er janvier 1994401. Le repérage est donc devenu extrêmement difficile avec l’écoulement du temps des modifications qui ne sont que consignées que dans les procès-verbaux de l’assemblée. Ainsi, il est souhaitable qu’une section des registres du syndicat soit consacrée uniquement au règlement de l’immeuble402.

Procès-verbaux. Les procès-verbaux et les résolutions écrites du conseil d’administration et de l’assemblée des copropriétaires doivent être conservés dans les registres du syndicat et tenus à la disposition des copropriétaires403. Une section est habituellement réservée à ceux du conseil d’administration et une autre à ceux de l’assemblée des copropriétaires. Certains syndicats, surtout les plus grands, prennent l’habitude de numéroter les résolutions, mais ce n’est pas une exigence de la loi. C’est une simple question d’organisation.

Nom des copropriétaires. Le nom et l’adresse des copropriétaires doivent apparaître dans les registres du syndicat404. En cas de divergence entre les mentions apparaissant au Registre foncier du Québec et celles inscrites au registre, le premier a préséance évidemment. Il est donc utile, voire nécessaire, d’informer le syndicat lors d’un changement de propriétaire, qu’il s’agisse d’une vente, d’une donation, d’une succession, de l’exercice d’un droit hypothécaire, d’un jugement ou autre mode d’acquisition d’un immeuble. L’avis est suffisant, mais certains préfèrent transmettre au syndicat une copie de l’acte à l’origine du transfert de propriété. Le registre des noms et adresse des copropriétaires doit être tenu à la disposition des copropriétaires405. Cela ne comprend pas leur adresse courriel ni leur numéro de téléphone qui ne doivent pas être communiqués aux autres copropriétaires406.

Locataires. Le syndicat a tout intérêt à connaître les occupants des fractions et c’est pourquoi la loi prévoit que les registres doivent comprendre le nom et l’adresse du locataire d’une fraction407. Cette information lui permet également de s’assurer que le locataire a reçu une copie du règlement de l’immeuble408. Ainsi, en cas de défaut du locataire de respecter les conditions de jouissance des parties privatives et communes, le syndicat dispose d’un recours direct contre le locataire409.

Créanciers. Les créanciers hypothécaires exigent que mention soit faite de leur créance dans les registres du syndicat, notamment pour bénéficier des dispositions de la déclaration de copropriété qui leur octroient certains droits, comme celui d’être avisé en cas de défaut du débiteur d’acquitter ses charges communes. En cas de sinistre, ils trouvent également un intérêt à être connus du syndicat410. La cession de droit de vote en faveur du créancier hypothécaire qui souhaite exercer ce droit est également inscrite au registre, sur demande du créancier411.

États financiers. Le Code civil prévoit également que sont déposés aux registres du syndicat les états financiers du syndicat412. Il faut ici distinguer entre les états financiers eux-mêmes et les livres de comptabilité comprenant toutes les pièces justificatives qui ne sont pas accessibles aux copropriétaires413.

Autres documents relatifs à l’immeuble. La Cour supérieure a jugé que l’estimation des coûts de réfection des parties communes, le budget des travaux, les documents d’appel d’offres, des soumissions reçues, le rapport du plan quinquennal d’entretien-réparation et le plan préventif d’entretien font partie des documents relatifs à l’immeuble au sens de l’article 1070 C.c.Q.414. Les expertises se rapportant à l’immeuble composent également les registres de la copropriété415. En conséquence, les copropriétaires y ont accès416. Toutefois, les copropriétaires n’ont pas le droit d’accès à tous les documents du syndicat puisqu’il faut établir une distinction entre le niveau d’accès des administrateurs et celui des copropriétaires417.

Confidentialité. La personne qui détient les registres du syndicat doit s’assurer, dans l’exercice de son devoir de mettre certains renseignements à la disposition du syndicat, de respecter les dispositions de l’article 37 du Code civil du Québec.

Elle ne peut toutefois, sous prétexte d’assurer la confidentialité, empêcher un copropriétaire d’avoir accès aux données qui doivent être tenues à la disposition des copropriétaires selon l’article 1070 C.c.Q. et la déclaration de copropriété418.

Assurance. On sait l’importance de déterminer, lorsque les contrats d’assurance sont contractés, mais aussi en cas de sinistre, ce qui constitue une amélioration apportée par un copropriétaire à sa partie privative419. Il est souhaitable que le syndicat détienne, dans ses registres, les informations nécessaires permettant aux assureurs et aux copropriétaires de déterminer avec exactitude ce qui est une amélioration et ce qui ne l’est pas.

C’est pourquoi le législateur a suivi les propositions du Comité consultatif en imposant au promoteur l’obligation de remettre au syndicat dans les 30 jours de la tenue de l’assemblée de transition la description des parties privatives au nouvel article 1106.1420. Il a aussi modifié l’article 1070 C.c.Q. en ajoutant un dernier alinéa qui impose que le registre du syndicat contienne une description suffisamment précise pour que les améliorations apportées par un copropriétaire à sa partie privative soient identifiables421. La date d’entrée en vigueur de ces deux dispositions est le 13 décembre 2018, pour les copropriétaires établis à compter du 13 juin 2018. Pour toutes les autres, il s’agit du 13 juin 2020422.

Les améliorations qui ne seront pas identifiables n’auraient pas à être assurées par les copropriétaires individuellement, mais demeureraient sous la responsabilité du syndicat423.


398. C.c.Q., art. 1070 et 342.
399. C.c.Q., art. 342 ; Fortier c. Syndicat des copropriétaires Condominium Les Châtelets, 2008 QCCS 2507, EYB 2008-134747.
400. Castilloux c. Syndicat des copropriétaires du 537 Jacques-Cartier est Longueuil, 2018 QCCQ 2107, EYB 2018-293639.
401. Supra, première partie, chapitre V, sections II et III, nos 289 et s.
402. Yves PAPINEAU, « Les copropriétaires et l’administration en copropriété divise », dans Service de la formation continue du Barreau du Québec, vol. 341, Développements récents en droit de la copropriété divise, Montréal, Éditions Yvon Blais, 2011, p. 65, 85-100. Annexe B, recommandation numéro 2.8.1 (2).
403. C.c.Q., art. 1070.
404. C.c.Q., art. 1070.
405. C.c.Q., art. 1070 ; Castilloux c. Syndicat des copropriétaires du 537 Jacques-Cartier est Longueuil, 2018 QCCQ 2107, EYB 2018-293639.
406. C.c.Q., art. 37.
407. C.c.Q., art. 1070.
408. C.c.Q., art. 1057.
409. C.c.Q., art. 1079.
410. C.c.Q., art. 1075.
411. C.c.Q., art. 1095.
412. C.c.Q., art. 1070.
413. Fortier c. Syndicat des copropriétaires Condominium Les Châtelets, 2008 QCCS 2507, EYB 2008-134747 ; Immeubles Heywood inc. c. Syndicat Le Versailles, 2008 QCCS 6215, EYB 2008-152454.
414. Fortier c. Syndicat des copropriétaires Condominium Les Châtelets, 2008 QCCS 2507, EYB 2008-134747. Certains registres d’entretien sont obligatoires en vertu du Code de sécurité. Loi sur le bâtiment, RLRQ, c. B-1.1 ; Code de sécurité, RLRQ, c. B-1.1, r. 3, chapitre VIII, Bâtiment, art. 337 et s.
415. Gauvin c. Syndicat de la copropriété Les Terrasses Monaco, 2008QCCS5850,EYB2008-151521.
416. La Cour du Québec a décidé que le syndicat agit abusivement en refusant de dévoiler à un copropriétaire une source d’information émanant d’un tiers alors que les copropriétaires doivent prendre une décision sur la base de cette information. Castilloux c. Syndicat des copropriétaires du 537 Jacques-Cartier est Longueuil, 2018 QCCQ 2107, EYB 2018-293639.
417. Immeubles Heywood inc. c. Syndicat Le Versailles, 2008 QCCS 6215, EYB 2008-152454.
418. Castilloux c. Syndicat des copropriétaires du 537 Jacques-Cartier est Longueuil, 2018 QCCQ 2107, EYB 2018-293639.
419. C.c.Q., art. 1073. Supra, deuxième partie, chapitre II, section II, B, 3, a), (i), nos 689 et s. Voir aussi recommandations 2.5.2 (2) et 2.5.2 (3).
420. Loi visant principalement à améliorer l’encadrement du secteur financier, la protection des dépôts d’argent et le régime de fonctionnement des institutions financières, L.Q. 2018, c. 23, art. 648.
421. Loi visant principalement à améliorer l’encadrement du secteur financier, la protection des dépôts d’argent et le régime de fonctionnement des institutions financières, L.Q. 2018, c. 23, art. 638.
422. Loi visant principalement à améliorer l’encadrement du secteur financier, la protection des dépôts d’argent et le régime de fonctionnement des institutions financières, L.Q. 2018, c. 23, art. 814(2).
423. Loi visant principalement à améliorer l’encadrement du secteur financier, la protection des dépôts d’argent et le régime de fonctionnement des institutions financières, L.Q. 2018, c. 23, art. 641 dont l’entrée en vigueur coïncide avec celle du règlement du gouvernement pris en application de l’article 1073 C.c.Q. (art. 814(11) de cette même loi).

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À propos de l'auteur

Me Christine Gagnon est notaire et détient un doctorat en droit de l'Université de Montréal, sa thèse ayant porté sur le droit de la copropriété. Elle exerce une pratique spécialisée en copropriété divise et indivise au sein de l'étude Gagnon Bujold notaires. Elle est aussi professeure associée à la Faculté de droit de l'Université de Montréal et chercheure associée à la Chaire du notariat. Elle enseigne le droit de la copropriété à la Faculté de droit de l'Université de Montréal, à la Faculté de droit de l'Université Laval et à la Faculté de droit de l'Université de Sherbrooke où elle est chargée de cours. De plus, elle a présidé le Groupe de travail sur la copropriété, coprésidé le Comité consultatif sur la copropriété de 2009 à 2012 et elle est membre de la Chambre nationale des experts en copropriété, à Paris. Me Gagnon est aussi porte-parole pour le site lacopropriete.info regroupant plusieurs ordres professionnels et organismes d'autoréglementation, sous la direction de la Chambre des notaires du Québec. Elle est responsable de la rédaction de la plupart des textes du site. Me Gagnon a reçu les distinctions suivantes :

  • Médaille du mérite du Conseil interprofessionnel du Québec, 2008
  • Médaille d'honneur de la Chambre des notaires du Québec, 2010

Christine Gagnon est l'auteure de l'ouvrage La copropriété divise, dont la 4e édition est parue en 2018 aux Éditions Yvon Blais.