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Les documents saisis par Revenu Québec lors de la perquisition effectuée dans les locaux d'Uber Canada ne seront pas mis sous scellé

Résumé de décision : Uber Canada inc. c. Québec (Agence du revenu), EYB 2015-254799 (C.S., 17 juillet 2015)
Blogue juridique

La requérante, Uber Canada inc., demande l'entiercement de choses, de documents et de renseignements saisis à ses bureaux de Montréal et auprès d'une banque par l'Agence du revenu du Québec (ARQ) en vertu d'autorisations judiciaires (des mandats de perquisition et une ordonnance de communication) accordées par un juge de la Cour du Québec en application des articles 40 et 40.1.3 de la Loi sur l'administration fiscale. En d'autres termes, la requérante demande, à titre de mesure de sauvegarde, que les éléments de preuve recueillis soient mis sous scellé et confiés à un tiers afin que les enquêteurs de l'ARQ ne puissent en prendre connaissance, et ce, dans l'attente du jugement sur sa requête en certiorari visant à faire annuler les autorisations judiciaires et à obtenir le retour des éléments saisis.

L'ordonnance d'entiercement est discrétionnaire et dépend de la considération de trois critères : 1) le caractère sérieux de la question de droit à trancher; 2) la possibilité que le refus de l'ordonnance cause au requérant un préjudice irréparable; 3) la prépondérance des inconvénients causés aux parties par l'ordonnance. Ces critères doivent être appliqués avec prudence et ne doivent pas être interprétés de manière à rendre automatique l'entiercement en cas de contestation d'un mandat de perquisition.

Le premier critère est relativement peu exigeant. Il faut simplement procéder à un examen sommaire pour vérifier que le requérant a une apparence de droit suffisante et que sa démarche n'est ni futile ni vexatoire. En l'espèce, les arguments de la requérante sont indéniablement sérieux et intéressants. La réplique de l'ARQ donne cependant à réfléchir. Cette dernière prétend que les arguments de la requérante vont, pour l'essentiel, au-delà de la portée limitée du recours en certiorari et relèvent plutôt d'un éventuel procès au fond sur la culpabilité. Il est vrai que le recours en certiorari a une portée limitée. Plus précisément, lors de la contestation d'une autorisation judiciaire, le rôle du juge réviseur consiste à vérifier la présence de motifs, fondés sur des renseignements suffisants et fiables, qui permettaient au juge qui a accordé l'autorisation de le faire. Il reste que les arguments avancés par la requérante sont sérieux et touchent, au moins en partie, à la compétence du juge qui a accordé les autorisations. Cela est suffisant à ce stade-ci.

En ce qui concerne le deuxième critère, il faut déterminer si le refus d'ordonner l'entiercement est susceptible de causer un préjudice irréparable au requérant. Le degré d'intrusion dans la vie privée qui est invoqué et la possibilité d'obtenir une réparation telle que l'exclusion de la preuve au procès sont des considérations pertinentes dont il faut tenir compte dans le cadre de l'analyse. Dans la présente affaire, la requérante ne démontre aucun préjudice autre que la prise de connaissance par l'ARQ du contenu des données et des documents saisis. Cela ne peut être suffisant pour satisfaire au critère du préjudice irréparable.

Quant au troisième critère, il requiert la pondération des intérêts divergents en jeu. La requérante n'a pas établi ici que la prépondérance des inconvénients commandait une intervention de la Cour. La pondération du droit de la requérante à une protection réduite de la vie privée -- l'expectative de vie privée est faible relativement à une activité commerciale réglementée de même qu'en matière d'application du régime fiscal --et du droit des contribuables au respect des lois fiscales milite en faveur de la position de l'ARQ.

Pour ces motifs, la requête en vue d'obtenir une ordonnance d'entiercement est rejetée.


Ce résumé est également publié dans La référence, le service de recherche juridique en ligne des Éditions Yvon Blais. Si vous êtes abonné à La référence, ouvrez une session pour accéder à cette décision et sa valeur ajoutée, incluant notamment des liens vers les références citées et citant.

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