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Le besoin pressant d’uriner de la défenderesse peut excuser son excès de vitesse.

Résumé de décision : Directeur des poursuites criminelles et pénales c. Reid, EYB 2021-420158, C.Q., 5 novembre 2021
Le besoin pressant d’uriner de la défenderesse peut excuser son excès de vitesse.

La défenderesse ne remet pas en cause le fait d'avoir conduit son véhicule à une vitesse de 140 km/h dans une zone où la limite permise est de 100 km/h. Elle plaide cependant avoir commis l'infraction par nécessité, son besoin pressant d'uriner lui ayant fait craindre de ne pouvoir se retenir davantage et d'uriner sur son siège. Il s'agit de savoir si le besoin pressant d'uriner de la défenderesse peut excuser son excès de vitesse.

La défenderesse témoigne avoir remarqué un besoin plus fréquent d'uriner (signes précurseurs d'une condition médicale maintenant connue et traitée). En pleine pandémie de la COVID-19, elle a cependant été contrainte d'attendre avant de consulter un médecin. Au moment des événements, en juin 2020, c'était la première fois qu'elle était confrontée à une telle situation lors d'un déplacement en voiture. En effet, les voyages étant interdits depuis mars 2020, c'était la première fois qu'elle prenait la route depuis l'apparition des signes précurseurs de sa condition médicale. Dès qu'elle a constaté les premières manifestations de son envie d'uriner, elle a commencé à chercher un endroit pour s'arrêter, mais en vain. Aucune option ne s'offrait à elle. Elle n'avait même pas la possibilité de se soulager en bordure de la route, vu l'absence de boisé.

Dans l'affaire Polcaro, la Cour supérieure (le juge R. W. Pronovost rédige la décision) dit que la défense de nécessité, dans les cas d'excès de vitesse, doit être admise que de façon exceptionnelle étant donné la sévérité des critères et leur application de façon stricte. Malgré ce constat, le juge Pronovost précise que dans notre système judiciaire, il y a lieu de faire place à la dignité humaine. Le juge Pronovost ajoute qu'il ne croit pas que notre système judiciaire puisse obliger un citoyen à faire ses besoins en bordure de la route à la vue de tous pour satisfaire à la défense de nécessité. En l'espèce, il appert du témoignage de la défenderesse que cette dernière s'est sentie piégée en raison du fait qu'elle ne pouvait trouver un endroit où s'arrêter. N'importe quel humain, comme elle, aurait éprouvé la peur d'uriner sur son siège. Il va sans dire que du point de vue humain, il s'agit d'une situation de danger. Le ministère public soutient que la défenderesse, qui connaissait son état, aurait dû agir autrement en prévoyant la situation et évitant ainsi de contribuer à la créer. La défenderesse a démontré qu'elle ne connaissait pas suffisamment sa condition médicale pour être en mesure d'anticiper l'événement. D'autre part, l'absence de halte routière et de station d'essence ne lui a pas permis d'agir autrement. Finalement, la preuve démontre que la défenderesse a excédé la vitesse permise de 40km/h alors qu'elle était sur une autoroute non achalandée. Il ne s'agit donc pas d'un grand excès de vitesse. En outre, comme la défenderesse était sur une autoroute, il n'y avait aucun accès à des résidences. La situation provoquée par l'excès de vitesse n'a pas entraîné une situation de danger très élevé, de sorte que le mal évité est plus important que le mal provoqué par la contravention à la loi.

En conclusion, la défense de nécessité est admise et la défenderesse est acquittée de l'infraction reprochée.

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