Résumé de décision : Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Côté, EYB 2015-256947 (C.A., 25 septembre 2015)
Le fils des plaignants est atteint d'un trouble envahissant du développement avec traits autistiques. Les plaignants se sont vu refuser l'accès au gîte tenu par les défendeurs en raison du chien d'assistance de leur fils, spécialement entraîné par la Fondation Mira pour accompagner les enfants ou adolescents autistiques. Bien que les parents ne fussent pas accompagnés de leur fils au gîte, le chien d'assistance devait rester en permanence avec eux, car il devait s'acclimater à son nouveau milieu de vie. À la suite de cet évènement, les plaignants ont déposé une plainte pour discrimination auprès de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (la Commission).
Le Tribunal des droits de la personne (le Tribunal), saisi par la Commission, a d'abord déterminé que l'autisme dont souffre le fils des plaignants est un handicap au sens de la Charte des droits et libertés de la personne (la Charte), que le chien d'assistance était un moyen pour pallier ce handicap, et que, si les plaignants avaient prévu être accompagnés de leurs fils pendant le séjour au gîte, le refus de les accueillir en raison de la présence du chien d'assistance aurait été discriminatoire au sens de la Charte. Ensuite, le Tribunal rejette le recours, concluant que rien dans la Charte ou dans une loi particulière n'attribue un statut particulier aux tuteurs de la personne handicapée, ce qui empêche de reconnaître aux plaignants la même protection que celle reconnue à leur fils handicapé.
Conformément à l'arrêt de la Cour suprême du Canada Mouvement laïque québécois c. Saguenay (Ville), la norme de révision applicable à une décision finale du Tribunal est déterminée par les principes de droit administratif relatifs à la révision judiciaire. En l'espèce, la norme applicable est celle de la décision raisonnable, car la question que devait trancher le Tribunal se situe au centre de sa mission.
La décision du Tribunal est déraisonnable : il aurait dû donner raison à la Commission et aux plaignants. Plutôt que d'interpréter la Charte de façon large et libérale, il s'en est tenu strictement à son texte en s'appuyant sur de la législation étrangère, sans chercher l'intention du législateur et sans s'interroger sur la finalité de la modification à la Charte introduisant le handicap comme motif de discrimination. Sa décision est donc renversée et la plainte est accueillie.
En ce qui concerne le redressement approprié, celui-ci doit indemniser l'atteinte au droit des plaignants à la reconnaissance et à l'exercice, en pleine égalité, de leur droit d'avoir accès aux lieux publics et aux services qui y sont disponibles. L'évaluation du préjudice moral comporte une composante objective. Les intimés ont commis une faute en refusant l'accès à leur gîte aux plaignants, mais cette faute est vénielle et les intimés l'ont par la suite reconnue. De plus, l'incompréhension et la fatigue que décrivent les plaignants ne sont pas causées par le refus des intimés à lui seul, qui peut être qualifié de bref, mais par une accumulation de frustrations et de circonstances pénibles de la vie quotidienne. Finalement, le seul fait d'interpréter l'article 10 de la Charte dans le sens recherché par l'appelante est susceptible de compenser le sentiment des plaignants. Dans ce contexte, il convient de réduire les condamnations recherchées à 200 $ pour chaque intimé.
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