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Une femme qui prétendait que ses voisins avaient volontairement gardé une mouffette en cage sur leur terrain pour qu’elle ne puisse profiter de sa cour arrière devra leur verser 26 000 $ en dommages-intérêts

Résumé de décision : Da Silva c. Thélot, EYB 2017-277732 (C.S., 27 mars 2017)
Une femme qui prétendait que ses voisins avaient volontairement gardé une mouffette en cage sur leur terrain

Alléguant des troubles de voisinage, les demandeurs, Manuel et Léonilde Da Silva et leurs enfants, réclament une indemnité de 75 000 $, le remboursement de leurs frais extrajudiciaires, qui s'élèvent à 12 110 $, ainsi que le prononcé d'une injonction permanente afin d'ordonner à leur voisine de ne pas les harceler et de ne pas troubler la jouissance paisible de leur immeuble. La défenderesse soutient que la demande est prescrite et réclame 10 000 $ pour abus de droit ainsi que le remboursement de ses honoraires extrajudiciaires, en plus de 10 000 $ pour ses troubles et inconvénients. Le litige a commencé en 2004 lorsque les demandeurs ont capturé une mouffette. La défenderesse soutient que ces derniers se sont amusés à provoquer la bête chaque fois qu'elle sortait manger sur son patio, et ce, pendant trois semaines. Elle ajoute que les enfants des demandeurs ont poussé de la neige dans sa cour, que Manuel l'a épié lorsqu'elle se baignait en 2006, que Leonilde a pénétré sur son immeuble en 2009 et qu'elle a coupé plusieurs attaches de la toile installée sur la clôture mitoyenne. Les demandeurs soutiennent que les accusations de la défenderesse sont sans fondement et que les mises en demeure envoyées en juin 2009 et en juin 2011, de même que la poursuite à la division des petites créances dont elle s'est désistée, sont abusives.

Comme le recours a été introduit le 3 avril 2012, les réclamations fondées sur les événements antérieurs au 3 avril 2009 sont prescrites puisque chaque journée passée constitue une échéance au niveau du dommage, et ce, même si ce dernier est continu. Il est toutefois noté que la modification des heures de travail de Léonilde, qui a débuté en 2008 en raison du harcèlement de la défenderesse à la station de métro et s’est poursuivie jusqu'à ce jour, est toujours pertinente.

Le témoin qui refuse de rendre disponible l’information visant à corroborer ses affirmations doit nécessairement voir sa crédibilité attaquée et la valeur probante de son témoignage diminuée. Or, la défenderesse a refusé de communiquer le contenu de son dossier médical. Il est également noté que cette dernière évite de répondre directement aux questions, qu'elle utilise des périphrases et qu'elle se contredit à l'occasion. Le témoignage des demandeurs, précis, posé, sobre, et surtout sans trop de rancoeur, est préféré au témoignage peu fiable, improbable et peu crédible de la défenderesse. L’élément déclencheur du conflit entre les parties, soit la provocation d'une mouffette pendant trois semaines, est absurde. Il y a lieu de privilégier la version de la fille de la défenderesse voulant que cet épisode n’ait duré que quelques minutes et qu’il ne se soit jamais reproduit.

Comme les demandeurs allèguent l'abus de droit et de procédure, de même que les comportements fautifs de la défenderesse, il y a lieu d’analyser les faits sous l’angle des articles 7 et 1457 C.c.Q., plutôt qu'à la lumière de l’article 976. Le stress causé par les mises en demeure de la défenderesse et le harcèlement subi après le 3 avril 2009 n’a aucune commune mesure avec une situation de voisinage normal. Le retrait de la demande reconventionnelle de la défenderesse, lors du dernier jour de l’instruction, ne fait pas obstacle au constat d’abus. On ne peut tenir rigueur aux demandeurs de ne pas avoir accepté le désistement mutuel sans frais proposé quelques mois avant l'audition considérant que la défenderesse a, elle-même, rejeté la branche d’olivier à plusieurs reprises. Les dommages moraux subis par Manuel et Léonilde sont évalués à 5 000 $ chacun. Les dommages subis par le fils des demandeurs qui n'a pas été impliqué depuis avril 2009, outre la poursuite à la division des petites créances, sont établis à 1 000 $. Les dommages de son frère, qui a été insulté et poursuivit en voiture par la défenderesse en mai 2009, alors que ce dernier était encore adolescent, sont fixés à 2 000 $. La mention du nom des enfants au plumitif civil de la division des petites créances ne constitue pas un dommage indemnisable puisque le préjudice, soit le fait qu'un employeur potentiel puisse y avoir accès, est hypothétique. De plus, les demandeurs ont contredit leur argument en décidant d’entamer leur recours ensemble.

Considérant l'atteinte aux droits à la protection de la dignité et de l’honneur des demandeurs, ainsi qu’à la jouissance paisible de leurs biens et le fait que la poursuite malveillante des enfants des demandeurs constitue une faute intentionnelle, les dommages exemplaires sont fixés à 1 000 $. Le remboursement des honoraires extrajudiciaires est également accordé. Malgré l'existence d'une paix relative depuis 2011, il est néanmoins ordonné à la défenderesse de ne pas importuner les demandeurs ni de troubler leur jouissance paisible vu la preuve du comportement erratique de la défenderesse et sa conviction d'être la victime. La demande est accueillie en partie.


Ce résumé est également publié dans La référence, le service de recherche juridique en ligne des Éditions Yvon Blais. Si vous êtes abonné à La référence, ouvrez une session pour accéder à cette décision et sa valeur ajoutée, incluant notamment des liens vers les références citées et citant.

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