Le 17 octobre 2018, la Chambre des communes du Canada a mis en vigueur la Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d’autres lois1, laquelle décriminalise la consommation de cannabis au Canada.
D’une part, bien que la Loi soit maintenant en vigueur, un syndicat demeure légitimé à adopter des règlements visant à interdire de fumer du cannabis dans les parties communes et parties communes à usage restreint d’une copropriété, et ce, à la majorité des voix des copropriétaires présents ou représentés à l’assemblée2.
D’autre part, l’adoption d’un tel règlement pour les parties privatives d’une copropriété est encore possible, mais certaines mises en garde s’imposent quant au contenu d’un tel règlement.
En effet, avant l’entrée en vigueur de la Loi et, donc, avant la décriminalisation du cannabis, aucun copropriétaire ne pouvait prétendre avoir le droit de fumer du cannabis dans sa partie privative, sous réserve des copropriétaires (ou des locataires ou des occupants) qui consommaient, dans leur partie privative, du cannabis à des fins médicales ou thérapeutiques.
À l’heure actuelle, soit à la suite de la décriminalisation de la consommation du cannabis au Canada, le syndicat devra composer avec la réalité de l’article 1102 du Code civil du Québec, lequel se lit comme suit (nous ajoutons les soulignements) :
« 1102 Est sans effet toute décision du syndicat qui, à l’encontre de la déclaration de copropriété, impose au copropriétaire une modification à la valeur relative de sa fraction, à la destination de sa partie privative ou à l’usage qu’il peut en faire. »
Par exemple, si la déclaration de copropriété, au moment de sa publication, n’interdit pas aux copropriétaires de fumer du cannabis dans leur partie privative et que, par décision de l’assemblée, est adopté un règlement qui l’interdit, cette décision impose aux copropriétaires, à l’encontre de la déclaration de copropriété, une modification à l’usage qu’ils peuvent faire de leur partie privative. Un tel règlement pourrait ainsi être déclaré inopposable à un copropriétaire qui fumait du cannabis dans sa partie privative avant que l’assemblée ne l’interdise.
Afin d’éviter un tel scénario, un règlement qui interdit de fumer du cannabis dans une partie privative devrait notamment inclure un régime d’exception transitoire (clause « grand-père ») qui préserve le droit personnel de certains copropriétaires de continuer à fumer du cannabis dans leur partie privative, malgré cette interdiction. Puisqu’il s’agit d’un droit personnel lié au copropriétaire (ou à son locataire ou à un occupant), il prendra automatiquement fin, à l’arrivée de certaines éventualités, notamment lorsque tout tel copropriétaire vend son unité ou déménage en vue de la louer.
Ce régime permettra ainsi d’une part de respecter l’esprit de l’article 1102 du Code civil du Québec en protégeant l’usage que certains copropriétaires (ou leurs locataires ou occupants) voudront faire de leur partie privative en y fumant du cannabis. Il permettra d’autre part une transition progressive vers un environnement où la qualité de l’air est autant que possible exempte de fumée secondaire, d’odeurs désagréables ou persistantes résultant de la fumée de cannabis, l’esprit de ce régime d’exception transitoire étant de préserver l’équilibre et la paix sociale au sein de la copropriété.
1 Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d'autres lois (ci-après appelée la « Loi »), L.C. 2018, ch. 16.
2 Art. 1096 C.c.Q.