Skip to content

M. Gabriel Bazin, ancien vice-président de la Ligue des Noirs du Québec, est condamné à payer des amendes totalisant 72 500 $ pour avoir exercé illégalement la profession d’avocat à plusieurs reprises depuis sa condamnation pour des infractions similaires prononcée en février 2018 et confirmée en juin 2019. EYB 2022-421221

Résumé de décision : Barreau de Montréal c. Bazin, C. Q., 10 janvier 2022
M. Gabriel Bazin, ancien vice-président de la Ligue des Noirs du Québec, est condamné à payer des amendes totalisant 72 500 $ pour avoir exercé illégalement la profession d’avocat à plusieurs reprises

Le 22 octobre 2021, le tribunal a déclaré Gabriel Bazin coupable de huit chefs d’infraction en lien avec l’exercice illégal de la profession d’avocat. Il convient maintenant de déterminer les peines.

Le tribunal constate tout d’abord que, pour l’ensemble des dossiers, il s’agit d’une récidive. L’amende minimale par chef est donc de 5 000 $. Le tribunal note ensuite que la situation financière de Bazin a peu changé depuis sa condamnation de 2018. Il déclare des revenus mensuels d’environ 1 102 $ provenant des deux paliers de gouvernement. De plus, la nomenclature des dépenses minimales pour sa subsistance semble dépasser ses revenus. Il affirme n’avoir aucune économie et ne pas produire de déclarations de revenus. Il n’a toujours pas payé les amendes de 3 000 $ et de 1 500 $ qui lui ont été imposées en juin 2019. Il explique qu’il a 83 ans et qu’il est à la retraite, ayant démissionné du poste qu’il occupait à titre de bénévole à la Ligue des Noirs du Québec la veille de la présente audience.

Le tribunal est bien conscient que la capacité de payer du défendeur est l’un des éléments à considérer pour préciser le montant d’une amende. Cependant, il ne s’agit pas d’un élément déterminant qui occulte tous les autres éléments à considérer dans la détermination de la peine. Le poursuivant invoque plusieurs facteurs aggravants, dont les suivants : Bazin a déjà été inscrit au Tableau de l’Ordre du Barreau du Québec comme avocat et il connaît bien les règles. Sa pratique est érigée en système : il ne donne pas de reçu pour les sommes versées en contrepartie de ses services, il ne fait pas les procédures promises et il rejette la faute sur ses clients lorsqu’il est confronté à son inefficacité. On ajoute que la notoriété qu’il détenait à la Ligue se traduisait par une certaine influence morale. Le tribunal gardera en tête ces éléments en analysant les différents constats d’infraction.

Dans le premier dossier à l’étude, Bazin a été reconnu coupable d’avoir exercé illégalement la profession d’avocat en agissant de manière à donner lieu de croire qu’il était autorisé à remplir les fonctions d’avocat ou à en accomplir les actes en proposant à la plaignante, moyennant rémunération, de préparer et de présenter son dossier relatif à sa demande de statut de réfugié à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. Nous constatons que ses agissements dans ce dossier sont la cause de la décision défavorable que la Commission a rendue à l’égard de la plaignante. Il a berné celle-ci sur une longue période et a réussi à lui soutirer 800 $. Dans les circonstances, l’amende de 10 000 $ réclamée par le poursuivant est appropriée.

Dans le second dossier à l’étude, Bazin a été reconnu coupable d’avoir exercé illégalement la profession d’avocat le 20 août 2019, en agissant devant le TAT pour et au nom de Mme A.I. Le poursuivant réclame une amende de 7 500 $ (au lieu des 5 000 $ annoncés au départ), car il appert que Bazin a continué de représenter des individus devant le TAT. L’amende réclamée est appropriée.

Dans le troisième dossier, Bazin a été reconnu coupable d’avoir exercé illégalement la profession d’avocat entre août 2019 et février 2020, en se laissant sciemment annoncer ou désigner par le titre de « Me Bazin » par la plaignante. À notre avis, la durée de la relation entre Bazin et la plaignante (d’août 2012 à février 2020), pendant laquelle celle-ci était convaincue que, vu ses agissements, Bazin était avocat, de même que les conséquences catastrophiques que les agissements de Bazin ont eues sur le frère de celle-ci, qui s’est vu déporté vers son pays d’origine, constituent des circonstances aggravantes qui justifient l’amende réclamée de 10 000 $.

Le constat délivré dans le quatrième dossier contient deux chefs d’infraction pour lesquels le poursuivant requiert une amende de 7 500 $ par chef. Cette réclamation tient compte du remboursement effectué par Bazin aux plaignants, mais aussi de la durée pendant laquelle celui-ci s’est fait passer pour un avocat sans qu’il y ait de demande d’asile de déposée pour les plaignants. Il y a lieu de considérer aussi dans ce dossier les avances que Bazin a faites à la plaignante. L’amende totale de 15 000 $ est justifiée.

Le constat délivré dans le cinquième dossier contient également deux chefs d’infraction, pour lesquels le poursuivant requiert cette fois une amende de 10 000 $ par chef. Il appert que, dans ce dossier, n’eût été la possibilité pour la plaignante de participer au programme spécial des Anges-gardiens, les agissements de Bazin auraient eu comme conséquence sa déportation vers son pays d’origine. Ces circonstances justifient l’amende réclamée.

L’amende de 10 000 $ réclamée dans le sixième dossier est également justifiée. La plaignante a rencontré Bazin, qui s’est présenté à elle comme avocat pouvant l’aider dans son dossier d’appel. Toutefois, après avoir déposé un avis d’appel, Bazin n’a jamais mis le dossier en état pour être entendu, et ce, malgré les nombreuses relances faites par la plaignante. L’appel de celle-ci a donc été rejeté. Heureusement, elle aussi a pu bénéficier du programme des Anges-gardiens et son statut a été régularisé.

Au total, pour l’ensemble des dossiers, le poursuivant réclame une amende de 72 500 $. Cette amende se trouve au bas de l’échelle, considérant que l’amende minimale en l’espèce totalise 40 000 $ et que l’amende maximale totalise 1 M $. Bazin plaide que l’amende minimale devrait lui être imposée, vu ses capacités financières limitées. Toutefois, comme il a été dit, cet élément n’est pas le seul à considérer. Le tribunal estime que, quand il y a des facteurs aggravants comme ceux du présent cas, il se doit de faire primer les principes de dénonciation et de dissuasion.

Pour ces motifs, le tribunal entend imposer les amendes suggérées par le poursuivant et octroyer un délai de 90 jours à Bazin pour s’en acquitter. Quant aux frais, vu le montant des amendes et la faible capacité de payer du défendeur, le tribunal entend les limiter aux frais dans le premier dossier.

 

You May Also Like
© Thomson Reuters Canada Limitée. Tous droits réservés. Mise en garde et avis d’exonération de responsabilité.