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Bell Mobilité est condamnée à payer près de 1 M$ à des clients ayant payé des frais de résiliation anticipée de leur contrat de téléphonie sans fil

Résumé de décision : Gagnon c. Bell Mobilité inc., EYB 2014-241807 (C.S., 3 septembre 2014)
Bell Mobilité est condamnée à payer près de 1 M$ à des clients ayant payé des frais de résiliation anticipée de leur contrat de téléphonie sans fil

Le 24 janvier 2011, le demandeur a été autorisé à exercer un recours collectif contre Bell Mobilité inc. (Bell), pour le compte des clients qui, depuis le 1er janvier 2007, se sont vus facturer des frais de résiliation anticipée (FRA) lorsqu'ils se sont prévalus de leur droit de résilier leur contrat. Ces clients avaient conclu un contrat à durée déterminée de 12, 24 ou 36 mois et avaient bénéficié, lors de la signature, d'un rabais sur l'achat d'un appareil sans fil. Lorsqu'ils ont décidé de mettre fin à ce contrat avant le terme prévu, Bell leur a facturé les FRA prévus au contrat. Le demandeur plaide que les FRA prévus dans les contrats de service Mobilité conclus entre le 1er janvier 2007 et le 30 juin 2010, date à laquelle la Loi modifiant la Loi sur la protection du consommateur et d'autres dispositions législatives est entrée en vigueur, sont illégaux et contraires aux articles 2125 et 2129 C.c.Q.

Le tribunal rejette la prétention de Bell que la clause stipulant le montant des frais devant être payés par le client en cas de résiliation unilatérale constitue une renonciation tacite non équivoque à l'application de l'article 2125. Il est vrai que les membres qui ont signé le contrat savaient que, en cas de résiliation unilatérale, ils seraient appelés à payer des FRA; le contrat le stipule en toutes lettres. Cependant, la clause ne fait aucunement référence à une renonciation au droit à la résiliation unilatérale du contrat. Par conséquent, le tribunal ne peut conclure que le client a exprimé une volonté de ne pas se prévaloir de son droit à la résiliation unilatérale. Il n'y a cependant pas lieu ici de qualifier la clause de «pénale», puisque la définition contenue dans la clause litigieuse indique bien que les FRA constituent une estimation des dommages, et non une pénalité.

L'article 2129 prévoit que le client qui exerce son droit de résiliation unilatérale est tenu de payer les frais et dépenses engagés par le prestataire de services et tenu «de tout autre préjudice que l'autre partie a pu subir». M. Vella, le directeur des finances de Bell depuis novembre 2008, a déclaré à plusieurs reprises à l'audience que le préjudice subi par Bell, lorsqu'un client résilie son contrat avant le terme qui y est prévu, est la perte de revenus anticipés jusqu'à la fin du terme. Pourtant, la jurisprudence est claire; le terme «préjudice» ne comprend pas les pertes de profit anticipé par le cocontractant. Le mot «préjudice» doit être interprété restrictivement, l'article 2129 étant une disposition dérogatoire au droit commun. Il ne peut s'agir que du préjudice qui découle directement de la résiliation. Pour le tribunal, donc, le seul préjudice subi ici par Bell est le rabais octroyé sur l'appareil sans fil lors de la conclusion du contrat.

Pour quantifier ce préjudice, les parties ont chacune fait entendre leur expert. Essentiellement, l'expert du demandeur a conclu que les membres s'étaient vus facturer des frais excessifs (variant entre 60 $ et 189 $, selon le cas). Quant à l'expert de Bell, il a expliqué que la réclamation moyenne des FRA était de 249 $ alors que le coût relié au rabais de Bell varie entre 226 $ et 246 $, pour une moyenne de 236 $. Pour lui, c'est donc dire que les membres qui ont payé des FRA auraient, en moyenne, déboursé 13 $ de plus que ce que l'article 2129 permettait à Bell de leur réclamer. Le tribunal favorise l'expertise produite par Bell, parce que les balises sur lesquelles l'expert du demandeur a basé sa quantification de la réclamation sont erronées. Cela dit, le groupe est défini en fonction des «personnes s'étant vues facturer des FRA». Bell a toutefois établi que seulement 26 % des personnes à qui elle avait facturé des FRA lui avaient effectivement payé la somme facturée. Le tribunal ne peut certes ordonner à Bell de rembourser aux membres des FRA qu'ils n'ont pas payés. Cela porte donc à 76 255 le nombre de personnes touchées par le présent recours collectif.

Vu la conclusion du tribunal sur les articles 2125 et 2129 C.c.Q., il n'est pas nécessaire de développer longuement sur l'argument subsidiaire du demandeur que la clause litigieuse contrevient aux articles 1437 C.c.Q. et 8 de la Loi sur la protection du consommateur (la Loi). Qu'il suffise de dire que le tribunal est d'avis que Bell n'a pas violé ces dispositions, car les membres n'ont pas subi de désavantage excessif et déraisonnable. Quant aux nouvelles dispositions de la Loi, elles ne peuvent avoir aucune incidence sur le sort du présent recours.

La réclamation de dommages-intérêts punitifs est rejetée, la preuve ne démontrant aucune violation intentionnelle, malveillante ou vexatoire de la part de Bell, non plus qu'une conduite marquée d'ignorance, d'insouciance ou de négligence sérieuse.

Le tribunal ordonne donc à Bell de déposer au greffe de la Cour supérieure la somme de 991 316 $ plus les taxes applicables et l'intérêt et l'indemnité additionnelle depuis le 5 janvier 2010, et ce, pour le compte des quelque 76 255 membres du groupe qui ont payé des FRA. Aucune somme n'est accordée aux membres qui se sont vus facturer des FRA, mais qui, dans les faits, n'en ont pas payés. La détermination du mode de distribution se fera à une date ultérieure à être déterminée.


Ce résumé est également publié dans La référence, le service de recherche juridique en ligne des Éditions Yvon Blais. Si vous êtes abonné à La référence, ouvrez une session pour accéder à cette décision et sa valeur ajoutée, incluant notamment des liens vers les références citées et citant.

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