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Le retour de l’affaire Wenger : quand l’enregistrement d’une marque sert de bouclier contre les dommages-intérêts

Par Me Sébastien Lapointe, Techtonik Legal inc.
Le retour de l’affaire Wenger : quand l’enregistrement d’une marque sert de bouclier contre les dommages-intérêts

Comme on s'en souviendra, les entreprises Wenger et Travelway sont impliquées depuis quelques années dans un beau litige de marques de commerce, au sujet de l’usage de logos reprenant l’essentiel du drapeau suisse sur des bagages, en tant que marques. En 2017, la Cour d’appel fédérale (C.A.F.) avait donné raison à Wenger1, en décrétant que les logos de croix de Travelway portaient effectivement confusion avec le logo de Wenger. Malheureusement pour Wenger, la C.A.F. s’était alors limitée à renvoyer le litige devant la Cour fédérale (C.F.) pour décider des recours à octroyer.

C’est de cette décision dont nous traitons cette fois-ci, celle de Wenger SA c. Travelway Group International Inc. (2019 FC 1104).

Cette décision donne finalement raison à Wenger, en quelque sorte. Puisque les marques en présence portaient à confusion, oui on est en présence de contrefaçon et même de délit de substitution (dans le passé). Le tribunal ordonne que le registraire radie les enregistrements quant aux logos en question de Travelway. Certes.

Comme Travelway a retiré ses bagages en question du marché, il ne demeure pas de question au sujet du besoin d’une ordonnance. La C.F. doit seulement trancher quant à ce qui s’est fait dans le passé.

À ce sujet, la C.F. se refuse à octroyer des dommages-intérêts à Wenger, compte tenu du fait que les logos de Travelway étaient toujours protégés par enregistrement jusqu’au moment où leur usage a cessé. En effet, ce qu’il faut comprendre à ce sujet c’est que la C.A.F., elle, n’avait pas déclaré que les enregistrements en question s’avéraient invalides (en 2017), ni même ordonné qu’on radie ceux-ci. Pendant toute la période pertinente, donc, Travelway utilisait des logos qui, bien que portant à confusion avec le logo de Wenger, étaient néanmoins protégés par des enregistrements de marque de commerce, au Canada. Il n’y a donc pas lieu d’ordonner que Travelway paie des dommages à Wenger, et ce, même si l’on est bien en présence de contrefaçon et de délit de substitution.

Cette décision vient donc confirmer que lorsqu’une entreprise s’est donné la peine d’enregistrer sa marque de commerce, un tribunal ne peut octroyer des dommages contre celle-ci, du moins pas avant qu’un tribunal n’ait prononcé l’invalidité de la marque en question et/ou fait ordonner la radiation de l’enregistrement visé.

Il s’agit d’une bonne illustration d’avantage qu’un enregistrement de marque de commerce peut fournir à son détenteur. Non seulement un enregistrement constitue-t-il une bonne arme, mais il sert également de bouclier si jamais on se fait poursuivre par un tiers. C’est très utile, puisque pour un investissement de quelques milliers de dollars (au plus), on peut s’éviter, comme cela a été le cas pour Travelway, de se faire éventuellement ordonner de payer des dizaines ou des centaines de milliers de dollars (ou plus !) en dommages-intérêts.


1. Group III International Ltd. c. Travelway Group International Ltd., 2017 FCA215

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About the Author

Maître Sébastien Lapointe œuvre depuis plus de vingt ans en pratique privée centrée sur le droit des affaires et, en particulier, l’interaction entre celui-ci et les questions de propriété intellectuelle, dont de droit des technologies. Sa pratique se centre particulièrement sur l’enregistrement de droits de propriété intellectuelle et les ententes de transfert de droits et de technologies, dont les licences, et ce, autant au Canada qu’à l’étranger.

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