Les clients défendeurs ont conclu un contrat de courtage exclusif avec les courtières immobilières demanderesses pour la vente de leur résidence, laquelle avait déjà été annoncée sur le site Du Proprio. Alors que le contrat était toujours en vigueur, les clients ont accepté une offre d’achat formulée par une personne qui avait vu la résidence affichée sur Du Proprio. Il en résulte que les courtières n’ont aucunement été impliquées dans la vente de la propriété. Or, le contrat prévoit une commission de 5 % sur le prix de vente, que les courtières participent ou non à la transaction. Refusant de payer la rétribution, les clients plaident que les manoeuvres dolosives, les fausses représentations et les informations incomplètes des courtières ont vicié leur consentement. Ils affirment que les explications verbales qu’ils ont reçues avant la signature du contrat contredisent les modalités de la rétribution qui y sont décrites. Ils disent n’avoir jamais consenti à signer un contrat donnant le droit aux courtières d’exiger le paiement d’une commission même dans le cas où elles n’auraient pas participé à la vente de la résidence.
Le consentement des clients pourrait avoir été vicié de deux façons, soit par le dol ou par l’erreur simple. C’est à eux qu’il revient de démontrer, par preuve prépondérante, l’existence d’un dol ou d’une erreur simple. Ce fardeau n’a pas été satisfait. Il est vrai que les courtières ont vraisemblablement manqué à certaines de leurs obligations contractuelles et déontologiques. Elles admettent d’ailleurs avoir reçu un avertissement écrit du syndic de l’OACIQ en lien avec la clause permettant aux clients de vendre eux-mêmes leur résidence, auquel cas la rétribution sera la même que si la vente découlait des services des courtières, et en raison du caractère inadéquat des informations qui leur ont été transmises. Cette décision du syndic, bien qu’elle constitue un simple avertissement et non une sanction, est un élément de preuve pertinent possédant une autorité de fait indéniable. Lors de la signature du contrat, les courtières se sont montrées très insistantes. L’environnement était plus ou moins propice aux discussions, puisque l’attention était souvent détournée vers les deux jeunes enfants. Le libellé de la clause en litige comporte des fautes d’orthographe, de grammaire et de syntaxe, ce qui dénote un manque de professionnalisme, quoiqu’elle demeure compréhensible pour des personnes raisonnables comme les clients. Cela dit, un manquement déontologique ne constitue pas forcément une faute civile. Le contrat donne la possibilité aux clients de résoudre le contrat de plein droit dans les trois jours suivant sa conclusion. S’ils l’avaient lu attentivement, ils auraient pu, après avoir réfléchi sur l’étendue de leur obligation, user de cette faculté. De plus, s’ils ont réellement manifesté leur volonté de ne payer aucune commission advenant une vente sans la participation des courtières, il est difficile d’expliquer la présence de leur signature au bas de la clause qu’ils contestent qui va à l’encontre d’une considération aussi essentielle. Dans le même ordre d’idées, il est difficile de croire que les courtières ont menti à ce sujet, alors que cette condition est indiquée explicitement, qui plus est de façon manuscrite. Le dol n’est donc pas établi. L’erreur simple non plus. De toute manière, il s’agirait d’une erreur inexcusable. Les clients étaient tous les deux présents lors de la signature du contrat. Ils ont tous les deux apposé leur signature non seulement sur le contrat, mais en bas de la clause de rétribution. Ni l’un ni l’autre n’a lu le contrat avant de le signer. Il s’agit là d’une erreur grossière qu’aucune circonstance particulière ne permet de justifier.
Le contrat signé par les parties est un contrat de consommation au sens de l’art. 1384 C.c.Q. Cette qualification donne au tribunal la possibilité de déterminer si la clause de rétribution est abusive. Comme il a été précédemment mentionné, la clause comporte une rédaction boiteuse. Toutefois, elle est intelligible et dénuée d’ambiguïté. Les clients ont signé un contrat de courtage exclusif. Il est de l’essence même de ce type de contrat que la rétribution soit exigible dès que la vente de l’immeuble se réalise pendant la durée du contrat, et ce, peu importe la participation du courtier à la transaction. Un fait demeure néanmoins : les courtières n’ont aucunement été impliquées dans la vente. Elles ont en outre utilisé les photos qui étaient accessibles sur Du Proprio et n’ont effectué que deux ou trois visites sans offre d’achat sur une période de six mois. L’imposition d’une rétribution égale à celle qui est prévue lorsque la transaction est initiée, supervisée et complétée par les courtières est de nature à désavantager excessivement et déraisonnablement les clients. La clause est abusive. Afin de corriger ce déséquilibre, il convient de réduire le pourcentage de la rétribution. En s’inspirant de la clause de partage de commission lorsqu’une autre agence ou un autre courtier collabore à la vente (qui est de 2 %), il y a lieu de réduire la rétribution à 3 %.
Du reste, il n’est pas possible de conclure que les clients ont usé de manoeuvres visant à empêcher les courtières de les retracer afin d’échapper à leur obligation de verser la rétribution. La demande reconventionnelle des clients est également rejetée. Rien ne prouve que les courtières aient utilisé la procédure de manière excessive ou déraisonnable ou dans un objectif de détournement de la justice. Quant aux infractions déontologiques, quoiqu’elles aient été partiellement établies, il est ardu d’identifier le préjudice qu’elles ont pu causer dans le contexte où il a été déterminé qu’elles n’ont pas vicié le consentement des clients et que la réduction de la rétribution est une mesure qui les indemnise intégralement.