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L’accusé qui a fui les lieux d’un accident mortel en raison de la panique provoquée par une crise d’anxiété n’avait pas l’intention spécifique requise pour commettre un délit de fuite

Résumé de décision : Québec (Directeur des poursuites criminelles et pénales) c. Sekandari, EYB 2015-251626 (C.Q., 1er mai 2015)
Résumé de décision extrait de La référence

L'accusé a été impliqué dans un malheureux et tragique accident d'automobile au cours duquel il a frappé un homme, causant ainsi sa mort. Il ne fait pas face à des accusations de négligence criminelle, de conduite dangereuse ou de conduite avec les facultés affaiblies. Il a « involontairement » et « accidentellement » frappé la victime. Ce qu'on lui reproche, c'est de ne pas s'être arrêté sur les lieux de l'accident pour porter secours à la victime.

Le délit de fuite est une infraction d'intention spécifique dont la preuve est facilitée par une présomption légale qui prévoit que, lorsqu'une personne ne s'arrête pas sur les lieux d'un accident dans lequel elle est impliquée, elle est présumée avoir voulu fuir ses responsabilités. Un accusé peut toutefois repousser cette présomption en soulevant un doute sur son intention.

Dans la présente affaire, rien ne permet de mettre de côté le témoignage de l'accusé, celui de son ami et l'ensemble de la preuve offerte en défense. L'accusé est cru lorsqu'il dit avoir fui les lieux de l'accident en raison de la panique provoquée par une crise d'anxiété. Sa condition particulière et ses antécédents médicaux sont des éléments qui rendent d'autant plus plausible l'état de panique qu'il décrit avoir vécu après l'accident. Sa crédibilité et sa fiabilité n'ont pas été ébranlées par le contre-interrogatoire du ministère public. En outre, l'ami de l'accusé, qui a décrit les symptômes observés chez ce dernier dans les minutes qui ont suivi l'accident, est crédible et corrobore l'état de panique que l'accusé décrit avoir vécu. Le scénario soumis tant par l'accusé que par son ami concorde aussi avec la séquence chronologique des événements de la soirée. L'on retient également les conclusions de la psychiatre Martine Bérubé, qui est d'avis que, dans le contexte du caractère imprévu et inattendu de l'accident, l'accusé a vécu un épisode tellement intense d'anxiété que cela a eu l'impact d'une bombe. Selon cette experte, l'accusé a subi une dissociation temporaire créée par un état de panique l'ayant empêché de former l'intention criminelle requise pour vouloir fuir ses responsabilités. D'ailleurs, la preuve révèle que l'accusé n'avait aucune raison de vouloir quitter les lieux. L'étrangeté de son comportement ajoute à la vraisemblance de son état de panique. Dès que l'accusé a repris ses esprits et que son état de panique s'est calmé, il a pleinement réalisé la gravité de la situation et il a posé le seul geste légitimement attendu de tout bon citoyen : il s'est présenté volontairement et de son plein gré au poste de police, et ce, à peine deux heures après l'accident, ce qui est compatible avec le temps nécessaire pour que sa crise d'anxiété se résorbe.

À la lumière de l'ensemble de la preuve administrée, l'accusé a soulevé un doute plus que raisonnable sur l'intention qu'il avait en quittant les lieux de l'accident, repoussant ainsi la présomption sur laquelle s'appuyait le ministère public. Nous sommes convaincus qu'en ne s'arrêtant pas sur les lieux de l'accident, l'accusé tentait de fuir son état de panique et n'avait pas l'intention de fuir ses responsabilités. Dans les circonstances, l'accusé est acquitté de l'infraction reprochée.


Ce résumé est également publié dans La référence, le service de recherche juridique en ligne des Éditions Yvon Blais. Si vous êtes abonné à La référence, ouvrez une session pour accéder à cette décision et sa valeur ajoutée, incluant notamment des liens vers les références citées et citant.

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