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Une évaluation de l'incidence de l'origine ethnique et culturelle (EIOEC) doit être obtenue par des démarches de l'avocat de la défense, et non au moyen d'une ordonnance du tribunal.

Résumé de décision : R. c. Joseph, EYB 2025-576877, C.S., 9 septembre 2025
Une évaluation de l'incidence de l'origine ethnique et culturelle (EIOEC)

L'accusé a été déclaré coupable d'homicide involontaire coupable (avec une arme à feu). Âgé de 19 ans au moment du crime, il est passible de l'emprisonnement à perpétuité, la peine minimale étant de quatre ans. Le ministère public réclame une peine de 14 ans d'emprisonnement. L'avocat de la défense suggère, lui, une peine de quatre ou cinq ans d'emprisonnement.

L'accusé a eu une participation secondaire dans la mort de la victime (un jeune homme de 18 ans). En effet, ce n'est pas lui qui a tiré, et rien n'indique qu'il savait que son complice était armé. Par contre, l'accusé a eu une participation importante dans les événements qui ont mené à la mort de la victime. C'est effectivement un conflit entre lui et cette dernière qui est à l'origine de l'homicide. En outre, dans les jours précédant l'attaque, l'accusé a eu des échanges acrimonieux avec la victime, en plus de tenir des propos menaçants envers elle. De surcroît, l'accusé a pris part activement à l'attaque, qui était préméditée, concertée et violente. Il savait ou devait savoir qu'il exposait la victime à un risque de blessure grave. Qui plus est, l'attaque a été commise devant plusieurs témoins, après que l'accusé et son complice se soient introduits dans une résidence où une fête était tenue. Ce sont là de circonstances qui accroissent la gravité du crime.

Il y a plus. La preuve confirme une propension à la violence chez l'accusé. Des vidéos trouvées sur son téléphone le montrent manipulant des armes à feu et prenant des poses de gangster. Une autre vidéo le montre cernant, intimidant et frappant un jeune homme dans un stationnement. L'accusé a également été condamné dans le passé pour des contacts sexuels. Il a aussi été sanctionné pour de nombreuses infractions disciplinaires (comportements agressifs et actes de violence) lors de sa détention préventive.

L'accusé est jeune. Il exprime des regrets et le souhait de s'amender. Il s'agit d'une amorce de prise de conscience. Le degré de responsabilité morale de l'accusé est cependant élevé. Il convient alors de privilégier la protection de la société, la dissuasion et la dénonciation, tout en visant la réhabilitation à long terme.

L'avocat de la défense a demandé au tribunal d'ordonner la confection d'un rapport présentenciel de type « évaluation de l'incidence de l'origine ethnique et culturelle », car l'accusé est un jeune homme noir qui a grandi dans le quartier Saint-Michel et dont les parents sont originaires d'Haïti (notons que la victime était, elle aussi, un jeune homme noir). Cette demande impromptue faite plus d'un mois après le prononcé du verdict a été refusée, essentiellement parce qu'elle est tardive. De toute manière, la demande n'avait aucune assise juridique. L'avocat de la défense admet lui-même que ce genre de rapport doit être obtenu par des démarches de la défense, et non au moyen d'une ordonnance du tribunal. Cela dit, l'ethnicité du délinquant peut parfois être un facteur pertinent. Le racisme peut avoir causé des difficultés, entraîné une marginalisation sociale ou économique et contribué à la criminalité. Toutefois, ce genre de considération doit être étayé par une preuve.

Considérant la gravité du crime, qui se situe à l'intersection des quasi-meurtres et des homicides involontaires coupables de gravité intermédiaire, et le degré de responsabilité morale de l'accusé, une peine de neuf ans d'emprisonnement est juste et appropriée. L'accusé est donc condamné à une telle peine, de laquelle est soustrait le crédit pour la détention préventive.

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