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La preuve de certains indicateurs de profilage racial n’exclut pas l’examen du contexte dans lequel s’inscrit la mesure contestée. Or, ici, le contexte n’a rien à voir avec le profilage racial ; la demanderesse a elle-même provoqué l’interception policière dont elle se plaint en adoptant un comportement erratique et en résistant à cette interception, puis à son arrestation subséquente pour entrave au travail des policiers.

Résumé de décision : Nakisha Bernard c. Denis, EYB 2024-558394, C.S., 2 décembre 2024
La preuve de certains indicateurs de profilage racial n’exclut pas l’examen du contexte dans lequel s’inscrit la mesure contestée. Or, ici, le contexte n’a rien à voir avec le profilage racial ; la demanderesse a elle-même provoqué l’interception policière dont elle se plaint en adoptant un comportement erratique et en résistant à cette interception, puis à son arrestation subséquente pour entrave au travail des policiers.

La faute extracontractuelle reprochée aux policiers défendeurs, la violation du droit à l’égalité et de la protection contre l’arrestation arbitraire ainsi que la responsabilité de la Ville en tant que commettante des policiers défendeurs constituent le fondement juridique de la demande en dommages-intérêts de la demanderesse. Mais la seule question réellement en litige est la suivante : la demanderesse a-t-elle été victime de profilage racial ? Or, la réponse à cette question est non.

Certains faits ont été prouvés ou ne sont pas contestés, mais, pour déterminer si la demanderesse a été victime de profilage racial, ces faits doivent être examinés et replacés dans leur contexte. En effet, la preuve de certains indicateurs de profilage racial n’exclut pas l’examen du contexte dans lequel s’inscrit la mesure contestée. Or, sur plusieurs aspects de l’événement reproché, la demanderesse a livré un témoignage peu crédible et peu fiable. Elle s’est contredite sur des éléments essentiels de l’événement et n’a pu prouver — ou a contredit — plusieurs des allégations qu’elle a formulées dans sa demande. En réalité, la preuve établit qu’elle a provoqué l’intervention des policiers et l’usage de la force dont elle se plaint. Alors qu’elle circulait en voiture dans le quartier Montréal-Nord, elle a invectivé et interpellé vigoureusement les policiers Waszczuk et Rossignol, stationnés aux fins d’une opération qui ne la concernait pas. Délaissant leur poste, les policiers ont tenté de l’intercepter, mais elle a résisté. Puis, quand elle n’a eu d’autre choix que d’obtempérer, elle est sortie de sa voiture et a continué de les entraver. Mise en arrestation pour entrave au travail des policiers, elle a fortement résisté. Ainsi donc, le contexte de l’intervention n’a rien à voir avec le profilage racial. La demanderesse a provoqué son interception et l’usage de la force en adoptant un comportement erratique et en résistant activement à cette interception, puis à son arrestation. Elle dit que les policiers lui ont fracturé le bras lors de l’intervention, mais la preuve ne l’établit pas clairement et, vu son comportement, il est probable qu’elle ait elle-même causé la fracture en se débattant.

Bref, à première vue, la demanderesse a fait la preuve d’éléments indicateurs de profilage racial. L’interception a dégénéré, certes. Mais la demanderesse n’a pas pour autant été victime de profilage racial ou d’un usage excessif de la force. Elle a fait l’objet d’une mesure prise pour des motifs réels de sûreté, de sécurité et de protection du public, et non « au hasard ». La couleur de sa peau n’a pas joué un rôle dans la décision et les actions des policiers. Ils ne lui ont pas imputé un comportement stéréotypé ; ils ont observé un comportement hautement inhabituel qui exigeait qu’ils interviennent pour s’assurer qu’elle ne posait pas un risque pour elle-même ou autrui. En réalité, les policiers ont fait preuve de professionnalisme autant que de mesure à son égard.

La demande doit conséquemment échouer.

La présente affaire souligne l’importance de ne pas décontextualiser les indices de profilage racial. Pris au premier degré, ils permettraient de reprocher à une personne en autorité une conduite qu’elle n’a pas adoptée consciemment ou inconsciemment. Mis en contexte, ils permettent de condamner le recours au profilage racial sans créer une forme d’injustice qui les décrédibiliserait au point de compliquer les efforts de la société pour l’éliminer. Les administrés qui sont réellement victimes de profilage racial en seraient les premiers perdants. Lorsque l’intervention policière et ses modalités sont dictées par le comportement dérogatoire d’un administré plutôt que ses caractéristiques personnelles, les policiers ne recourent pas au profilage racial ; ils mettent en œuvre la mission dont ils sont investis, qui inclut « la paix, l’ordre et la sécurité publique » dans le respect des droits et libertés.

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